Emeute à Lomé – avril 2010

Violents affrontements entre policiers et manifestants à Lomé

AfriSCOOP

21 04 2010 Lomé

— Pour une troisième fois, une veillée du Front républicain pour l’alternance et le changement (Frac) qui continue de contester la victoire de Faure Gnassingbé au dernier scrutin présidentiel au Togo, tourne à des courses poursuites, affrontements, bastonnades et autres formes de violence. Ce mercredi encore, ce qui devrait être une séance de prière et de recueillement a donné lieu à un spectacle d’horreur dans la capitale togolaise.

Il est environ 11h. Le quartier Hanoukopé (au centre de Lomé) est bouclé par la police. Toutes les rues menant à l’Eglise méthodiste sont investies. Au fil des minutes, une foule de plusieurs milliers de militants du Frac se masse sur le boulevard du 13 Janvier (principal artère de la capitale togolaise) et bloque la circulation. Les maintes tentatives des officiers de la police avec en renfort les pasteurs qui tentaient de convaincre la foule, survoltée, de libérer la circulation, échouent.

Vers midi, les policiers, avec à leur tête, le commissaire Abalo Assih décident de disperser la foule. Une pluie de grenades lacrymogènes particulièrement piquantes et assourdissantes s’abat alors sur les manifestants. Des jeunes essayent de constituer des poches de résistance et répliquent par des jets de pierre et de toutes sortes de projectiles. D’autres mettant feu à des pneus et forment des barricades.

S’en suit, une course poursuite à travers le quartier Hanoukopé et les affrontements ont duré plusieurs heures. Aucun bilan n’est encore donné tant du côté de l’opposition que du gouvernement.

Mercredi soir, le Frac (principale coalition des partis d’opposition) a prévu une veillée au sein de l’Eglise méthodiste. Mais, selon des informations recueillies par AfriSCOOP, une « pression » aurait été exercée sur les responsables de l’église pour annuler cet événement.

Des sources concordantes susurrent les noms du porte-parole et personnalité influente du gouvernement, Pascal Bodjona et de son collègue de la Sécurité, le Colonel Atcha Titikpina comme principaux acteurs de cette situation.

In fine, un consensus aurait été trouvé. La veillée devra se faire à la mi-journée, pour des raisons de sécurité. La manifestation devra alors se confondre à une séance de prière hebdomadaire de l’église. Mais voilà, à quelques heures du début de cette « veillée de mi-journée », le Temple méthodiste Salem de Hanoukopé est interdit d’accès au public, même aux membres de l’église.

« On n’a pas besoin d’autorisation pour aller prier dans une église, le Rpt multiplie d’ailleurs les messes et prières musulmanes dans ce pays sans que personne ne l’interdise », affirme à AfriSCOOP, Eric Dupuy, le Chargé de communication de l’Union des forces de changement (Ufc, parti leader du Frac).

Pour lui, « c’est la brimade qui continue dans notre pays où si vous n’êtes pas un Gnassingbé (ndlr : famille de l’actuel chef de l’Etat) ou un membre du Rpt (parti au pouvoir depuis 43 ans), on vous considère comme des sous-hommes et vous n’avez droit à rien ».

Si les marches et meetings hebdomadaires de samedi du Frac se sont, eux, bien déroulés jusqu’ici, les veillées par contre, ont toujours provoqué une réaction particulièrement violente de la part des forces de l’ordre.

La répression de la première veillée s’est soldée par plus d’une soixantaine de blessés, selon l’opposition. Le 14 avril, une manifestation similaire a provoqué le saccage du siège de l’Ufc par la gendarmerie. Soixante-dix-sept personnes ont été aussi interpellées avant d’être relâchées.

« Tout cela ne nous décourage guère. Nous, on va continuer malgré tout jusqu’au rétablissement de la vérité des urnes qui ont donné une large victoire à Jean-Pierre Fabre », assure Eric Dupuis.

La police disperse les militants du FRAC en prière l’Eglise Presbytérienne Salem

letogolais.co

Des policiers déployés en grand nombre au quartier Hanoukopé à Lomé, ont dispersé ce mercredi à 12h30 GMT, des militants du FRAC. Ces derniers se sont mobilisés en grand nombre, à l’appel de leur « élu » Jean-Pierre Fabre, pour réunion de recueillements et de prières à de l’Eglise Presbytérienne Salem.

Le contingent conduit par le Commissaire Assih n’a ménagé ses efforts pour charger les militants prieurs avec des grenades lacrymogènes. Ils ont également sauvagement bastonné à coup de matraques. La situation devient de plus en plus tendue. Des jeunes qui se sont repliés ont barricadé les routes. Un grand vent de panique totale souffle sur la capitale, les stations d’essence ont fermé.

Pour le Commissaire Assih, les militants du FRAC sont interdits de prier avec les fidèles de l’Eglise Méthodiste Salem de Hanoukopé. Kagba Charles, le Pasteur de l’Eglise a dit regretter cette attitude des gendarmes. Jean-Pierre Fabre et les autres leaders du FRAC invitent les togolais à être encore plus nombreux à la marche de samedi 24 avril et que leur vœu pour que la crise togolaise trouve une fin heureuse soit exhaussé.m

Repression sanglante des manifestants : des miliciens en renfort aux forces de l’ordre

Icilome.com

[4/21/2010] La contestation par le Front républicain pour l’alternance et le changement (FRAC) de la victoire de Faure Gnassingbé à l’élection présidentielle du 04 mars dernier a atteint son paroxysme ce mercredi 21 avril 2010 où Lomé, a vécu une guérilla urbaine et des exactions policières de tous ordres. On se croirait en plein Bagdad ce mercredi midi. Les Forces de sécurité d’une part et les jeunes militants du FRAC de l’autre se sont affrontés à coups de cailloux et de gaz lacrymogènes pendant des heures dans les rues de Lomé. Ainsi, ce que les uns et les autres redoutaient en appelant les Forces de sécurité et les acteurs de la politique togolaise à la retenue a eu lieu.

En effet, depuis la proclamation des résultats de l’élection présidentielle passée, qui a connu la « victoire » très contestée du candidat du Rassemblement du peuple togolais (RPT), le FRAC et ses alliés ne font pas économie d’initiatives pour dénoncer ce qu’ils qualifient de « hold-up électoral » du pouvoir. Ainsi, en dehors des marches de protestation pacifiques que le FRAC organise à chaque fin de semaine, s’est ajoutée l’idée d’une veillée de prière à la bougie.

Si le parti au pouvoir donne l’impression d’accepter le principe de l’organisation des marches pacifiques dans le pays, il n’en est pas de même pour les « veillées de prières ». Trois veillées, trois incidents, dont les plus graves sont sans nul doute ceux d’hier. C’est là le sombre bilan occasionné par le refus obstiné du pouvoir de permettre la tenue de ces veillées du FRAC, en « violation systématique des lois républicaines », selon Jean-Pierre Fabre.

La première de ces veillées, organisée le mercredi 24 mars 2010 au siège de l’Union des forces de changement (UFC), a été interrompue par l’intervention des forces de l’ordre; il eut ce jour plusieurs blessés graves et un gendarme sérieusement défiguré. La raison avancée par l’Officier Anité Bertin pour justifier la dispersion de la rencontre est l’attaque sur les lieux de la veillée d’un gendarme en service par des jeunes du FRAC. Passé cet incident, beaucoup ont cru que les futures veillées du FRAC seront moins mouvementées et plus acceptées par le gouvernement en place. Quelle ne fut alors leur surprise, lorsque les mêmes Forces de l’ordre, qui étaient intervenues la première fois, ont récidivé en effectuant une nouvelle descente sur le siège le mercredi 14 avril dernier lors de la seconde veillée organisée par le FRAC, emportant avec eux, des objets de valeur trouvés sur les lieux et, d’après les responsables de l’UFC, une somme de vingt-deux (22) millions de francs Cfa.

Hier mercredi 21 avril 2010, c’est la troisième fois qu’une veillée appelée par les responsables du FRAC est réprimée dans le sang et à coups de matraques. Pourtant, nous confie un responsable du Front, afin d’éviter des altercations avec les Forces Armées togolaises, le FRAC a décidé d’organiser sa veillée entre les quatre murs d’une l’èglise, l’Eglise Méthodiste Salem de Hanoukopé qui est légalement reconnue par l’Etat togolais, et en pleine journée. Mais cette garantie a semblé ne pas suffire aux autorités togolaises, les Forces de l’ordre vont boucler l’entrée de l’Eglise et interdire son accès aux participants venus à la cérémonie. Ceux-ci, de leur côté, refuseront de quitter les lieux, créant du coup, un attroupement monstre sur le Boulevard circulaire. Il régnait une atmosphère très tendue en face de la Bourse du Travail ce mercredi. Pendant plusieurs heures, les jeunes du FRAC et les soldats placés sous les ordres du Commissaire Assih, se sont observés, invectivés, toisés, sans en venir aux mains. Mais tout d’un coup, les Forces de l’ordre, armées de bonbonnes de gaz lacrymogènes vont charger la foule, créant une débandade générale. La suite a été un échange de cailloux et de gaz lacrymogènes entre la police et les jeunes qui se sont spontanément organisés pour se défendre. Tous les quartiers du centre ville de Lomé ont été gagnés par cette guérilla urbaine. Houétrivikondji, Hanoukopé, Déckon, Bè et d’autres ont vécu un après-midi particulier fait d’explosions de gaz lacrymogènes et de fumée de pneus. « Nous voulons le changement, confie un jeune en colère, Faure n’a pas gagné cette élection, c’est pourquoi il a peur que Dieu entende les cris du peuple affamé et en colère lors des veillées. Sinon, pourquoi ont-ils tant peur des veillées de prières pour les ramener en plein midi et à la fin les interdire tout simplement ? ».

Des dizaines de blessés ont été transportés dans les cliniques de Lomé. Parmi ces blessés, un vendeur des produits Fan Milk de passage. Il a été pris à partie par les Forces de l’ordre qui l’ont sérieusement tabassé avant de le laisser pour mort.

Des témoins ont fait état de la présence des miliciens aux côtés des Forces de l’ordre lors de la répression. Ceux-là mêmes qui avaient fait parler d’eux en 2005 en procédant à des exécutions sommaires au sein de la population togolaise. Ils ont été observés en train d’apporter leur soutien à la police. Ils étaient remarquables à leur gabarit imposant, en tenue civile, tatouages tout le long du bras, des cordelettes en main pour certains. Outre ce fait, certains rapportent que des militaires de formation ont été vus en tenues de policiers parmi les Forces de sécurité sur le terrain. « J’ai vu un élément de la Garde présidentielle parmi les policiers, nous dit un passant, il était en uniforme de police alors que je le connais bien, c’est un élément de la garde présidentielle, un béret vert ».

~ par Alain Bertho sur 22 avril 2010.

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