Bain de sang symbolique à Bangkok – 16 mars 2010

Des arguments écrits avec du sang

Radiocanada.ca

mardi 16 mars 2010

Des partisans de l’ex-premier ministre Thaksin Shinawatra ont déposé des bouteilles remplies de sang devant le siège du gouvernement, mardi, pour démontrer qu’ils sont prêts à se sacrifier pour avoir gain de cause.

Les Chemises rouges, fidèles à M. Thaksin, avaient prévenu lundi le premier ministre Abhisit Vejjajiva qu’ils réaliseraient ce coup d’éclat s’il refusait de dissoudre le Parlement et de convoquer de nouvelles élections, comme ils le réclament.

Depuis samedi, des dizaines de milliers de partisans de l’ex-premier ministre sont rassemblés à Bangkok, dans ce qui constitue un nouvel épisode du bras de fer opposant les élites urbaines aux classes pauvres, issues le plus souvent de milieux ruraux.

Cette lutte révèle une véritable fracture sociale dans ce pays de 66 millions d’habitants.

Le sang versé devant la Governement House mardi, en début de soirée, a été prélevé en petite quantité sur des volontaires se trouvant dans la marée rouge de manifestants. Les organisateurs, qui voulaient amasser un mètre cube de sang, ont assuré que l’opération a été menée de façon sécuritaire, avec des seringues propres.

La méthode choisie par les Chemises rouges a entraîné des critiques de la Croix-Rouge, qui l’a jugée peu hygiénique. L’organisation humanitaire a aussi soulevé le fait que ce sang aurait pu aider à sauver des vies, mais en vain.

Lundi, le premier ministre Abhisit Vejjajiva a exclu de dissoudre le Parlement et de convoquer des élections législatives. « Nous sommes tous d’accord pour reconnaître que cela ne peut être fait », a-t-il dit. « Cependant, cela ne veut pas dire que les partis de la coalition gouvernementale et moi-même n’écouteront pas leurs idées », a-t-il ajouté, en guise d’ouverture.

Les Chemises rouges estiment qu’Abhisit est arrivé au pouvoir de manière illégitime, après que la Cour suprême eut exigé la dissolution d’un parti pro-Thaksin menant la coalition gouvernementale en décembre 2008.

Bien que deux soldats aient été blessés lundi par l’explosion de quatre grenades dans le quartier général du 1er Régiment d’infanterie, qui forme la garde rapprochée du Roi, les manifestations des Chemises rouges sont restées pacifiques jusqu’ici. L’armée n’a pas officiellement blâmé les Chemises rouges pour l’attaque de lundi.

Crise politique durable

La Thaïlande est engluée dans une grave crise politique qui a éclaté au grand jour en 2006, lorsqu’un coup d’État militaire a entraîné la destitution de M. Thaksin.

L’ex-premier ministre, qui a fait fortune dans les télécommunications, était accusé de corruption, mais ses partisans, issus des régions rurales et des classes urbaines défavorisées, ont soutenu que l’élite urbaine traditionnelle et les partisans du roi Bhumibol avaient fomenté le tout dans leur propre intérêt.

Le bras de fer a entraîné plusieurs changements de gouvernement, qui se sont soldés par de nombreuses démonstrations de force des deux clans, reconnaissables à leur couleur, rouge pour les partisans de M. Thaksin et jaune pour ses opposants. Les affrontements entre les deux clans ont fait plusieurs morts.

Trois jours de manifestations

Les dizaines de milliers de partisans de Thaksin Shinawatra sont arrivés samedi dans la capitale en provenance du nord du pays, à bord de camions, à moto ou encore en autobus, d’où s’échappaient des chants sur la démocratie et la liberté.

Certains observateurs ont présenté ce rassemblement comme étant celui de la dernière chance en vue du retour de Thaksin Shinawatra, poussé à l’exil par un coup d’État militaire en 2006.

Les opposants veulent paralyser Bangkok, et ils ont indiqué qu’ils y resteraient au moins une semaine. Ils sont encouragés par M. Thaksin lui-même. L’ex-premier ministre s’est d’ailleurs adressé à ses partisans par vidéoconférence dimanche soir.

« Les gens qui causent des problèmes dans le pays ces jours-ci proviennent de la classe dominante », a-t-il déclaré, en invitant les manifestants à poursuivre leur manifestation pacifiquement. M. Thaksin a ajouté que le peuple allait devoir régler « les problèmes liés à la démocratie, à l’égalité et à la justice ».

Sous haute sécurité

Environ 50 000 militaires ont été déployés dans les rues de la capitale pour prévenir tout débordement. Le palais du gouvernement a été placé sous haute surveillance. Des soldats ont été postés devant des banques et des édifices publics. Le gouvernement redoute des attaques, y compris des attentats à la bombe.

Les Chemises rouges ont assuré que leur mobilisation serait pacifique, mais la dernière grande manifestation d’avril 2009 avait dégénéré en émeute, faisant deux morts et plus d’une centaine de blessés.

La manifestation a lieu deux semaines après que la Cour suprême eut reconnu Thaksin Shinawatra coupable d’abus de pouvoir et de conflit d’intérêts. Le tribunal a ordonné la saisie de la moitié de sa fortune, soit 1,4 milliard de dollars, accumulée de façon illégale.

M. Thaksin vit à Dubaï pour échapper à une condamnation précédente à deux ans de prison ferme pour des malversations financières dans un autre dossier.

Radio-Canada.ca avec Agence France Presse, Associated Press et Reuters

Du sang pour demander de nouvelles élections en Thaïlande

Canadianpress

16 03 2010

BANGKOK — Les partisans de l’ancien chef du gouvernement Thaksin Shinawatra ont commencé mardi à déverser du sang devant le siège du gouvernement, une action symbolique destinée à réclamer de nouvelles élections en Thaïlande, après plusieurs jours de tensions dans la capitale Bangkok.

Des centaines de « Chemises rouges » ont fait la queue en début de matinée pour que des infirmières prennent leur sang. Les dirigeants du mouvement espèrent en recueillir un mètre cube.

Chaque volontaire a donné un peu de son sang, qui a ensuite été transféré dans de grands récipients en plastique. La police a permis aux dirigeants de la manifestation d’approcher le portail de fer blanc du siège gouvernemental pour déverser le sang.

Le Premier ministre Abhisit Vejjajiva n’a pas repris le chemin de ses bureaux depuis le début des manifestations vendredi. « Le sang du peuple se mélange pour lutter en faveur de la démocratie », a déclaré aux manifestants l’un des dirigeants du mouvement, Nattawut Saikua. « Quand Abhisit travaillera dans son bureau, il se souviendra qu’il est assis sur le sang du peuple ».

Un des organisateurs, Weng Tochirakarn, a fait savoir qu’un demi-mètre cube avait déjà été recueilli auprès de 50.000 manifestants en milieu d’après-midi. Les protestataires n’ont pas déversé la totalité du sang récolté, précisant que le restant serait répandu devant le siège du Parti démocrate au pouvoir et la maison du Premier ministre s’ils n’obtenaient pas gain de cause.

Selon le porte-parole du gouvernement, Panitan Watanayagorn, les manifestations seront autorisées tant qu’elles resteront pacifiques. « S’ils veulent déverser (le sang) pour faire une opération de communication et nous laisser nettoyer derrière, il n’y a pas de souci », a-t-il déclaré à des journalistes étrangers. Il a cependant précisé que les autorités sanitaires vérifiaient si cette opération « violait des mesures sanitaires ». Peu après, une équipe médicale de nettoyage, en blouses blanches, masques et gants en caoutchouc, est intervenue pour nettoyer le sang.

Le général Wichai Sangprapai, de la police thaïlandaise, a précisé que le nombre de manifestants présents à Bangkok avait diminué depuis dimanche, passant de 100.000 à environ 90.000. Les « Chemises rouges » ont réclamé au gouvernement la dissolution du Parlement lundi à la mi-journée. Le Premier ministre a refusé, et sécurisé la capitale, tout en se disant prêt au dialogue.

En réponse, les responsables de l’opposition ont appelé à « un sacrifice du sang », un projet dénoncé par la Croix-Rouge, qui y voit un gâchis et une source potentielle de contamination si les aiguilles sont réutilisées. Les manifestants affirment que ce n’est pas le cas. L’organisation ajoute qu’une telle quantité de sang pourrait « sauver de nombreuses vies ».

Plusieurs moines bouddhistes en robe orange, interdits de toute action politique par la loi, figuraient parmi les premiers candidats au don de sang. L’un d’entre eux a fièrement montré sa seringue.

« J’ai confiance (en nos dirigeants) et trouve leurs stratégies raisonnables et acceptables. S’ils disent que nous continuons, je suis prêt », a confié Suriya Laemthong, 28 ans, qui a donné son sang malgré sa peur des aiguilles. Il a cependant douté que cette action ait un quelconque effet sur le gouvernement.

L’instabilité politique règne en Thaïlande depuis que Thaksin Shinawatra a été renversé par un coup d’Etat militaire en 2006. Les partisans de Thaksin, réunis au sein du Front uni de la démocratie contre la dictature, considèrent qu’Abhisit Vejjajiva a pris le pouvoir illégalement grâce au soutien de l’armée et de l’élite traditionnelle du pays.


Manifestations : Du sang pour Thaksin !

gavroche-thailande.com

16/03/2010

Tôt ce matin, les leaders des Rouges ont commencé à donner leur sang, suivis par des centaines de supporters. Leur but : déverser mille litres devant la Maison du Gouvernement, au bout de Rachadamnoen Avenue.

« C’est une opération symbolique, a déclaré hier Natthawut Saikua, l’un des leaders du mouvement. Les ministres marcheront dans le sang des manifestants pour se rendre au travail. » Ou plutôt en sortant du travail, car l’opération, annoncée pour 8 heures ce matin, a été repoussée, faute de temps pour collecter les dons, à ce soir.

Il est 7 heures du matin. Le petit village des rouges, soit entre 40 000 et 50 000 personnes (1), qui occupe toute l’avenue Rachadamnoen depuis vendredi dernier, s’éveille : les protestataires se lèvent, balaient leurs habitations de fortune, prennent leur petit-déjeuner. Puis tout doucement commencent à se diriger vers le Pan Fah Bridge où se tient la scène principale et le QG des leaders de l’UDD. Là où aura lieu la collecte de sang.

Ils sont des centaines à avoir répondu à l’appel. Trois files d’attentes longues de plus de 200 personnes mènent vers les deux chapiteaux installés pour l’occasion. A l’intérieur, un hôpital de fortune a été dressé. Autour de deux longues tables, une dizaine de médecins et infirmières piquent, à la chaîne, une ou deux seringues au bras des volontaires. Puis le liquide est versé dans des bombonnes en plastique contenant un anti-coagulant, qui trônent sur les tables. Les « Rouges » ont prévu de récolter mille litres de sang (sur plus de 100 000 volontaires) pour les déverser ensuite sur le perron de la Maison du gouvernement.

Les donneurs semblent très fiers de leur action – « Je fais ça contre Abhisit, pour qu’il nous prenne au sérieux ! » explique l’un deux – et se laissent piquer avec le sourire, même si quelquefois l’aiguille dérape. A vu d’œil, les conditions d’hygiène semblent respectées… à peu près. On prend la tension des donneurs avant de prélever et la saignée du coude est soigneusement désinfectée. Si bien évidemment une seringue ne sert qu’une fois, des cotons imbibés de sang ou des seringues usagées traînent parfois sur les tables. Le prélèvement dure deux minutes environ. Impossible de connaître le nom des hôpitaux qui ont fourni le personnel et le matériel nécessaires à la collecte, mis à part celui du Somdej Prapinklao Hospital, qui figure sur la blouse des médecins.

L’opération de « répandage » en elle-même aura lieu ce soir à 18 heures. En attendant, le siège du gouvernement est sous bonne garde, protégé par deux rangées de militaires armés.

C.O. (avec M.C.)

(1) Ces chiffres représentent une moyenne constante estimée par les reporters de la rédaction du Gavroche présents sur les lieux des manifestations. Ils sont calculés en fonction du volume et de la densité d’occupation de la manifestation. Ces chiffres sont recoupés par plusieurs observateurs indépendants présents sur place à un moment donné.


Les chemises rouges organisent un bain de sang symbolique

Reuters

16/03/2010

BANGKOK – Les opposants au gouvernement thaïlandais ont trouvé mardi un moyen spectaculaire d’exprimer leur mécontentement en vidant devant les bureaux du Premier ministre des bouteilles remplies de leur propre sang.

Par cette action, les « chemises rouges« , partisans de l’ancien chef du gouvernement Thaksin Shinawatra, souhaitaient symboliser leur « sacrifice pour la démocratie » alors que leur demande d’élections parlementaires anticipées a été rejetée.

Après quatre jours de rassemblements pacifiques à Bangkok, les manifestants se sont massés devant le palais du gouvernement et ont déversé 300 litres de sang sur les grilles protégeant le bâtiment.

« Lorsque cette image parviendra à Abhisit, n’aura-t-il pas un peu honte de lui-même ?« , s’est interrogé Rung Suramanee, ancien fonctionnaire de 76 ans. « Je suis prêt à sacrifier n’importe quoi pour que le pouvoir de la majorité soit restauré. Que sont 10 centimètres cubes de sang ?« 

Depuis quatre jours, le Premier ministre thaïlandais, Abhisit Vejjajiva, reste inflexible face à la contestation, provoquant une frustration grandissante dans les rangs du mouvement.

« Nous avons versé notre sang. Qu’allons-nous faire ensuite ? Je ne sais pas bien où tout cela va. J’ai confiance dans les ‘chemises rouges’ mais je ne suis pas certain que nous obtenions quelque chose sans bousculer un peu les choses« , a commenté Chanchai Thiangsomboon, agriculteur de la province de Kalasin, dans le nord-est du pays.

THAKSIN APPELLE À POURSUIVRE LA LUTTE

Les « chemises rouges« , des militants essentiellement venus des zones rurales, estiment avoir été privés de leur droit de vote par les élites urbaines, les royalistes et l’armée qui ont formé une alliance de raison pour évincer du pouvoir les alliés de Thaksin.

Ils réclament la dissolution du parlement et l’organisation d’élections anticipées et ont menacé de manifester une semaine durant, mais leur ultimatum n’a pas fait plier Abhisit.

Certains se disaient frustrés mardi de cette absence de résultat malgré un rassemblement de 150.000 personnes dimanche soir à Bangkok.

« Je veux intensifier cela et faire quelque chose d’audacieux« , a dit Manat Tengmanee, venu du Nord.

« Je pense que si on ne verse pas vraiment du sang, il n’y aura pas de changement. Il n’y a jamais eu de changement pour le peuple en Thaïlande sans effusion de sang« , a-t-il ajouté, assurant toutefois respecter l’appel des leaders du mouvement à la non-violence.

Lundi, les partisans de Thaksin avaient manifesté jusqu’à la base militaire où Abhisit Vejjajiva a installé son quartier général de crise, avant de se regrouper près d’un pont où ils ont établi leur campement, mardi.

Deux fois élu à la tête du gouvernement, Thaksin a été renversé en 2006 par un coup d’Etat, puis condamné à deux ans de prison pour corruption. Il vit depuis lors en exil, principalement à Dubaï.

Dans un discours de 40 minutes par téléphone, il a exhorté lundi soir les manifestants à poursuivre la lutte.

« La patience du peuple est la clé du succès. Ne perdez pas courage maintenant. Soyez patients« , a-t-il dit, avant d’appeler les partenaires de coalition d’Abhisit à se retirer du gouvernement pour « le salut de la démocratie« .

Ambika Ahuja, Grégory Blachier et Pierre Sérisier pour le service français

~ par Alain Bertho sur 16 mars 2010.

Une Réponse to “Bain de sang symbolique à Bangkok – 16 mars 2010”

  1. impressionnant
    j’en reste muette
    article très complet et je ne…..savais pas
    merci

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