Emeutes en Mongolie juillet 2008

Etat d’urgence en Mongolie après des violences post-électorales

Reuters mercredi 2 juillet 2008

Le président mongol, Nambariin Enkhbayar, a proclamé mardi soir l’état d’urgence pour une durée de quatre jours à la suite d’affrontements post-électoraux qui ont fait cinq morts.

Des manifestants faisant état de fraude électorale lors des législatives de dimanche ont affronté mardi la police et ont mis le feu au siège du Parti révolutionnaire du Peuple mongol (PRPM, ancien parti unique, au pouvoir en Mongolie).

L’état d’urgence signifie que les manifestations sont désormais interdites, et il autorise les services de sécurité à disperser les rassemblements de protestation en recourant à la force. Les quartiers du centre d’Oulan-Bator sont soumis à un couvre-feu nocturne.

« Nous exhortons les parties à régler de manière légale les questions litigieuses concernant les résultats électoraux et à rechercher une solution à la crise actuelle basée sur le consensus », a déclaré lors d’une conférence de presse le ministre de la Justice, Monkh-Orgil.

Il a précisé que 220 civils et 108 policiers avaient été blessés dans les affrontements et que quelque 700 manifestants avaient été interpellés.

La commission électorale n’a pas encore annoncé les résultats définitifs du scrutin, mais des résultats préliminaires créditent le PRPM de la majorité absolue au Parlement, le Grand Houral.

Le Parti démocratique (opposition) a rejeté ces résultats tout en désavouant les auteurs de violences.

Des représentants du Parti démocratique et du PRPM devaient se réunir mercredi.

« De la mer du Japon à la frontière orientale de l’Europe, nous sommes la seule démocratie qui fonctionne et nous avons le devoir de la sauver », a déclaré à Reuters Tsakhiagiin Elbegdorj, chef du Parti démocratique.

Il a reproché au gouvernement d’avoir laissé l’émeute se poursuivre si longtemps, tout en estimant qu’il n’était peut-être pas nécessaire de proclamer immédiatement l’état d’urgence.

DÉMOCRATIE NAISSANTE

Les troubles risquent de repousser encore des accords sur l’exploitation des immenses réserves de cuivre, de charbon, d’uranium et d’autres ressources du sous-sol mongol.

Analystes et hommes d’affaires étrangers minimisent néanmoins l’impact des violences et soulignent que la majorité des Mongols ne les approuvent pas et qu’il s’agit en quelque sorte d’une crise d’adolescence d’une jeune démocratie.

« La banlieue d’Oulan-Bator abrite de nombreux jeunes, pauvres et frustrés pour lesquels tous les prétextes sont bons pour descendre dans les rues et participer à des troubles », note Luvsandendev Sumati, de la Fondation indépendante Sant Maral.

Le pays connaît une inflation sans précédent depuis des décennies, qui a atteint 15,1% l’an dernier, et de nombreux habitants se plaignent du chômage et du coût élevé de la vie.

Les investisseurs espèrent l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement majoritaire qui soit en mesure de faire ratifier par le Parlement un accord d’investissement permettant la mise en exploitation du gisement d’or et de cuivre d’Oyu Tolgoi.

L’accord, qui selon ses promoteurs, Ivanhoe Mines et Rio Tinto, pourrait faire progresser le Produit intérieur brut mongol de 34%, pourrait donner le coup d’envoi à d’autres accords miniers.

Selon la Banque asiatique de Développement, les investissements étrangers directs en Mongolie se sont élevés à 500 millions de dollars l’an dernier, dont les deux-tiers environ portaient sur le secteur minier.

A Oulan-Bator, des expatriés veulent espérer que l’émeute ne relève que d’un cas isolé de frustration post-électorale.

« Il s’agit d’une démocratie naissante et les gens doivent apprendre à vivre avec la réalité de n’être pas élus », souligne un cadre étranger.

Après l’explosion de violence d’une foule estimée à 8.000 personnes par le ministre de la Justice, la capitale a retrouvé un calme tendu avec le déploiement dans les rues de véhicules blindés.

Les chaînes autres que la télévision publique ont cessé d’émettre, un couvre-feu est en place dans certains quartiers d’Oulan-Bator et la vente d’alcool est interdite pendant toute la durée de l’état d’urgence.

La commission électorale a promis d’accélérer le dépouillement. Les observateurs internationaux ont estimé que dans l’ensemble le scrutin avait été libre et démocratique. Mais une modification du système électoral a entrainé des problèmes de procédure et de la confusion dans le dépouillement.

Avec Lindsay Beck et Ian Ransom, version française Nicole Dupont

Que se passe-t-il en Mongolie?

20minutes.fr

2 juillet 2008

Violentes manifestations, morts, état d’urgence… La Mongolie a fait face à de sérieux troubles, mardi.

Que s’est-il passé?

Des milliers de mongols ont violemment manifesté dans la soirée, à Oulan Bator la capitale. Ils étaient furieux que les anciens communistes aient revendiqué la victoire aux élections législatives, lundi, alors que les résultats officiels se font encore attendre. Plusieurs incendies, de voitures notamment, ont été allumés. Cinq personnes sont mortes et 329 autres ont été blessées (221 civils et 108 policiers) et 718 personnes ont été interpellées, selon le ministre mongol de la Justice. Les vitres du siège du Parti populaire révolutionnaire mongol (PPRM, ancien parti communiste) ont été brisées et ses bureaux pillés. Des échauffourées rares dans cette jeune démocratie qui a quitté le giron soviétique en 1992. Mardi soir, le président mongol a décrété l’état d’urgence pour quatre jours et un couvre-feu interdisant toute circulation la nuit dans le centre d’Oulan Bator.

Pourquoi de telles tensions?

Trois explications, selon Gaëlle Lacaze, spécialiste de la Mongolie, pour qui ces manifestations ne sont pas étonnantes. D’abord une crise urbaine: «Entre 1998 et 2000, 400.000 personnes ont afflué vers la capitale après plusieurs intempéries ayant causé la perte de leur bétail ou de leurs récoltes. Cet exode rural s’est traduit par l’émergence de bidonvilles, dits «quartiers de yourtes», en périphérie d’Oulan Bator. Aujourd’hui, la moitié de la population mongole se concentre dans la capitale, où un tiers vit sous le seuil de pauvreté. La situation est bien meilleure dans les campagnes où les habitants subviennent à leurs besoins.»

La révolte tibétaine du mois de mars ne serait également pas étrangère aux manifestations, selon cette spécialiste: «Lorsque j’y suis allée l’année dernière, la population n’était absolument pas dans un esprit de contestation.»

Enfin, il s’agirait aussi d’une crise politique. «Les violences de mardi soir ne sont pas dirigées contre les communistes mais contre tous les politiques.»

Un pays paralysé

Les anciens communistes, qui ont dirigé le pays de 1921 à 1996, et leurs rivaux démocrates se disputent le pouvoir. Aux dernières législatives de 2004, les deux partis s’étaient retrouvés quasiment à égalité, se partageant de fait le pouvoir au sein d’une coalition tendue qui paralysait toutes réformes. En quatre ans, le pays a connu trois Premiers ministres. «Depuis la proclamation de la démocratie, cohabitations et alternances politiques se sont succédées au gouvernement, souligne Gaëlle Lacaze. D’où une certaine paralysie, surtout au niveau local.»

De même au niveau économique. Malgré d’importantes richesses dans son sol, la Mongolie est le 114e pays le plus pauvre au monde sur 177, selon l’Indice de développement humain (IDH) calculé par l’ONU. «C’est un pays pillé par des entreprises étrangères, qui puisent dans ses ressources naturelles, d’uranium notamment, et gangrené par la corruption», affirme Gaëlle Lacaze. Le pays est pourtant une plaque tournante incontournable du commerce entre la Russie et l’Asie et entre la Chine et l’Europe. «Les Jeux olympiques sont une opportunité économique importante pour la Mongolie, qui espère profiter de la manne de touristes se rendant à Pékin.»

Sandrine Cochard

Mongolie: les forces de l’ordre ont repris le contrôle après les violences

OULAN BATOR (AFP) — Les forces de l’ordre patrouillaient mercredi dans le centre d’Oulan Bator, capitale de la Mongolie, au lendemain des violentes manifestations déclenchées par une contestation des élections législatives.

Cinq personnes ont trouvé la mort et plus de 300 autres ont été blessées (221 civils et 108 policiers) lors de ces violences, selon le gouvernement.

Le président a décrété mardi l’état d’urgence pour quatre jours. Des milliers d’électeurs, furieux que les anciens communistes aient revendiqué la victoire alors que les résultats officiels se font encore attendre, s’étaient affrontés dans la soirée avec la police anti-émeutes.

Mercredi, les incendies étaient éteints, laissant place à des tas de débris et des voitures calcinées. Le siège du Parti populaire révolutionnaire mongol (PPRM, anciens communistes), bâtiment de style soviétique qui a servi de point de ralliement aux manifestants, restait béant, toutes ses vitres brisées et ses bureaux pillés.

Des dizaines de policiers et membres des forces spéciales gardaient l’immeuble noirci, tandis que d’autres circulaient en ville, à pied ou à bord de blindés ou de chars.

A côté, le Palais de la Culture a aussi été en partie incendié et pillé. « Des jeunes, ivres, ont cassé tout ce qu’ils pouvaient et allumé des feux. Ils ne faisaient pas de différence entre ce qui est de l’art ou pas, ils cassaient tout », a raconté la directrice de la galerie d’art moderne, Enkhtsetseg.

Mardi soir, la police avait tiré des balles en caoutchouc et des grenades lacrymogènes contre une foule de 8.000 manifestants, ne réussissant à maîtriser le mouvement que tard dans la nuit.

L’état d’urgence prévoit notamment l’interdiction de la vente d’alcool et des restrictions contre la presse. Seule la télévision nationale est autorisée à diffuser. Un couvre-feu interdit toute circulation la nuit dans le centre.

Dans cet immense pays de moins de 3 millions d’habitants, les anciens communistes et leurs rivaux, les Démocrates, se disputent le pouvoir depuis le retour de la démocratie en 1992, après plus de 70 ans dans le giron soviétique.

Aux dernières législatives de 2004, ils s’étaient retrouvés quasiment à égalité, se partageant le pouvoir au sein d’une coalition tendue, paralysant toutes réformes.

Les violences, rares dans cette jeune démocratie, ont désolé de nombreux Mongols. « L’élection ne s’est pas déroulée de façon juste », regrette Denzin Chuluunbaatar, un travailleur social de 45 ans. « On est un petit pays, on ne peut pas se permettre de se bagarrer ».

Le Premier ministre Sanjaagiin Bayar, issu du PPRM, a accusé les Démocrates d’avoir suscité l’explosion de violence en accusant les anciens communistes de fraude électorale.

Mais pour le leader des Démocrates, Tsakhiagiin Elbegdorj, « c’est la faute du PPRM qui a acheté cette élection. C’est ça qui a mis les gens en colère ».

Lundi, le PPRM avait assuré avoir remporté la majorité au Parlement avec 45 sièges sur les 76 que compte le Grand Houral.

La commission électorale nationale doit encore se prononcer. « En raison des disputes, il faut recompter. C’est pour cela que nous n’avons pas encore de résultat final », a indiqué à l’AFP un porte-parole.

En Mongolie, où l’inflation a été de 26% entre mars 2007 et 2008, un tiers de la population vit toujours avec moins de 1,30 euro par jour.

Des émeutes font cinq morts

JDDInternational

02/07/200808:15

Des émeutes à Oulan-Bator, capitale de la Mongolie, ont fait cinq morts et plus de 300 blessés parmi les manifestants qui dénonçaient des fraudes électorales lors des élections législatives de dimanche, a annoncé mercredi le ministre de la Justice. Au moins un étranger, un ressortissant japonais, est au nombre des blessés, a déclaré le ministre lors d’une conférence de presse. Quelque 700 personnes ont été interpellées pour avoir participé à ces manifestations qui ont conduit le chef de l’Etat, Nambariin Enkhbayar, à proclamer l’état d’urgence.

le président déclare l’état d’urgence

01.07.2008

Des milliers de protestataires s’étaient massés devant le siège du Parti populaire révolutionnaire mongol (PPRM), donné vainqueur des élections de dimanche, jetant des pierres et s’opposant à la police anti-émeutes. Le bâtiment a ensuite été incendié.

Le président de Mongolie Nambariin Enkhbayar a décrété mardi 1er juillet à 23H30, heure locale, (15H30 GMT, 17H30 à Paris) l’état d’urgence pour quatre jours alors que des violences ont éclaté à Oulan Bator à la suite des résultats contestés aux législatives, a annoncé la télévision nationale.

Peu auparavant, le siège de l’ancien parti communiste de Mongolie, qui a revendiqué la victoire aux élections législatives de dimanche, avait pris feu, après que de violentes manifestations ont éclaté devant le bâtiment à Oulan Bator. Une épaisse fumée noire s’élevait de l’immeuble, siège du Parti populaire révolutionnaire mongol (PPRM). Quelques minutes auparavant, le Premier ministre Sanjagiin Bayar avait lancé un appel au calme.

Des milliers de protestataires s’étaient massés devant le siège du Parti populaire révolutionnaire mongol (PPRM), jetant des pierres et s’opposant à la police anti-émeutes, selon les images diffusées en direct par Eagle Television.

La police a tenté de disperser la foule en ouvrant le feu et en jetant des grenades lacrymogènes, selon la même source.

Le PPRM a assuré lundi avoir remporté la majorité au Parlement avec au moins 44 sièges sur les 76 sièges du Grand Houral, une déclaration jugée prématurée par la commission électorale nationale.

Une situation politique instable

Des dernières législatives, en 2004, était sorti un Parlement sans parti majoritaire, les deux grandes formations contrôlant alors chacune 36 sièges.

Les partis politiques avaient dû mettre sur pied une coalition instable pour diriger le pays.

Depuis 2004, la Mongolie a connu ainsi trois chefs de gouvernement, le dernier étant Bayar.

Le PRPM était le parti unique du temps où la Mongolie communiste était un satellite de l’URSS.

Cette année, au moins 13 partis, en plus des deux grands, présentaient des candidats, et la nouvelle loi électorale permettait une plus grande représentation à la proportionnelle.

~ par Alain Bertho sur 2 juillet 2008.